Tableau I - Principales toxicités et complications des agents chimiotoxiques

Principales toxicités et complications des agents chimiotoxiques*, **

Cellules touchées

Toxicités et complications

Particularités

Cellules du tractus gastro-intestinal

Nausées
Vomissements
Anorexie
Diarrhée
Pyrosis

Fréquence variable selon la molécule et le patient.
À noter une diarrhée importante chez 50 % des patients sur l’Irinotecan. On donne à ces patients du Loperamide (Imodium®) dès les premiers signes, pour contrer cet effet et éviter la déshydratation.

Cellules hépatiques

Hépatite toxique

Possible nécrose hépatocellulaire ou cholestase.
Atteinte relativement fréquente : on recherche pendant le traitement une élévation des enzymes hépatiques ou l’apparition d’une cholestase.
Rarement, certaines molécules provoqueront une nécrose hépatique sévère.

Cellules muqueuses de la bouche

Stomatite
Dysgueusie

Les ulcères buccaux (herpes, moniliase) et les stomatites apparaissent habituellement 5 à 16 jours après le début de la chimiothérapie.
Les soins préventifs de la bouche sont essentiels et ont pour but de réduire l’incidence et la gravité des stomatites.

Cellules muqueuses du vagin

Vaginite

Les symptômes sont non spécifiques : leucorrhée souvent hydrique, prurit et odeurs. L’examen révèle une inflammation diffuse des parois vaginales.

Cellules hématologiques

Neutropénie (risque d’infection)

Lymphopénie

Le pic de la neutropénie survient le plus souvent entre le 8e
et le16e jour du traitement :
elle précède habituellement la thrombopénie.

- Plus de 1 x 10 9/L = peu de risque d’infection
- Moins de 0,5 x 10 9/L = risque d’infection bactérienne sévère 

La neutropénie fébrile est une urgence médicale Tableau II .
Deux formes de Filgastrime (aussi appelée G-CSF  soit  Growth Colony Stimulating Factor) sont disponibles sur le marché canadien, le Neupogen et le Neulasta ®. Elles sont administrées aux personnes à risque de développer une neutropénie grave lors d’une chimiothérapie. Elles stimulent les cellules souches de la moelle osseuse de la lignée des neutrophiles pour favoriser la prolifération et la maturation des granulocytes neutrophiles.

 

Anémie

L’anémie est fréquente après une chimiothérapie cytotoxique, mais rarement à un niveau requérant des transfusions.
Le seuil transfusionnel varie d’un patient à l’autre et selon son état général : il est défini par l’intensité des signes et symptômes de l’anémie (fatigue, faiblesse, dyspnée) et de ses complications comme l’insuffisance respiratoire, coronarienne ou cardiaque.
La transfusion devra être CMV négative si une greffe est envisagée dans l’avenir pour un patient. Cette transfusion devra être irradiée si le patient a reçu une greffe de moelle récente.
Les transfusions de culot d’érythrocytes comportent des réactions relativement fréquentes, quelquefois sévères : infections bactériennes, fièvre, allergies, réaction d’urticaire ou d’anaphylaxie, surcharge avec possible décompensation cardiaque (on administre du furosémide intraveineux en prévention aux patients à risque), embolie gazeuse ou coagulopathie de dilution.
L’Epoetine-alpha (Éprex®) et la Darbopoiétine (Aranesp®) peuvent être utiles pour ­­­certains patients anémiques, surtout ceux avec des cancers non myéloïdes, pour prévenir et traiter l’anémie reliée à l’administration de la chimiothérapie. Selon les données disponibles, ces agents réduisent le recours à des transfusions et améliorent la qualité de vie de ces patients.
 

Thrombopénie (risque de saignement)

 Elle est habituellement moins sévère que la neutropénie.
- Aucun risque de saignement si 50 000 X 10 9/L plaquettes ou plus.
- Si les plaquettes sont moins de 50 000 X 10 9/L, il est recommandé d’éviter les injections intramusculaires ou toute autre manœuvre invasive et de faire cesser toute médication prédisposant au saignement (ASA, héparine, AINS).
On peut offrir des transfusions de concentrés plaquettaires au besoin lorsque le patient saigne activement ou s’il est à risque élevé d’hémorragie (décision individuelle) :
–si < 100 000 X 10 9/L et saignement important ou manœuvre invasive au SNC
–si < 50 000 X 10 9/L et risque élevé de saignement, comme après une chirurgie ou une manœuvre invasive
–si < 10 000 X 10 9/L, car alors le risque de saignement spontané est très élevé
La durée moyenne de vie des plaquettes est très brève, moins de 7 jours, à peine 24 à 48 heures quelquefois : cette intervention est justifiée pour un désordre temporaire pour lequel on espère voir la moelle récupérer sa production.

 

Coagulopathies
Thromboses

 
 

Système immunitaire affaibli.

Les cancers dits secondaires, c'est-à-dire ceux attribués à la chimiothérapie, dont la fréquence varie selon le traitement donné, seraient expliqués par cet affaiblissement.

Cellules de la peau

Perte de cheveux

Réversible, mais cet effet indésirable demeure une des complications psychologiquement les plus éprouvantes du traitement de chimiothérapie.
La perte de cheveux débute habituellement après la 2e semaine ou même après le premier mois. Le casque de glace est utilisé en prévention dans certains centres. La repousse de cheveux débute 6 à 8 semaines après la fin du dernier traitement et peut être d’une couleur ou d’une texture différente de la chevelure d’origine.

 

Desquamation

Réversible

Cellules du tractus cardiovasculaire

Insuffisance cardiaque
Arythmies

Toxicité aiguë transitoire : modifications du segment ST, troubles de la repolarisation, troubles du rythme.
Toxicités chroniques : cardiomyopathies chroniques, plus fréquentes avec certaines molécules (anthracyclines). Lors de l’administration de ces agents, on effectue un suivi régulier de la fonction ventriculaire pendant le traitement. L’insuffisance cardiaque peut progresser après le traitement, rester stable ou se résorber.
Nécroses myocardiques rares (Cisplatine, Methotrexate, VP 16).

Cellules du tractus pulmonaire

Fibrose pulmonaire
Pneumopathie immuno-allergique

La fibrose est une complication rare, irréversible
Les complications pulmonaires sont retrouvées surtout avec la bléomycine à hautes doses qui peut provoquer un dommage alvéolaire diffus. 
Le méthotrexate peut provoquer une toxicité pulmonaire lors de traitements prolongés.

Cellules du tractus urinaire

Insuffisance rénale

S’assurer au départ d’une bonne fonction rénale, d’une bonne diurèse et d’une bonne hydratation.
Le Cisplatin est néphrotoxique. Cette nephrotoxicité affecte le tubule proximal et distal. Elle est caractérisée par une diminution de filtration glomérulaire, une perte d’électrolytes (potassium et magnésium) ou une insuffisance rénale. La réversibilité de la néphrotoxicité chronique est souvent lente de sorte que la baisse de magnésium et de la fonction rénale peuvent persister des années.

 

Cystite hémorragique

Des métabolites toxiques de la Cyclophosphamide ou du Ifosfamide sont le plus souvent responsables de cette complication. Il faut donc s’assurer d’une bonne hydratation et de mictions fréquentes lors de ces traitements. On doit ajouter un agent uroprotecteur (Mesna®) lors de l’hydratation lorsqu’on administre le Cyclophosphamide à hautes doses ou du Ifosfamide.

 

Baisse du magnésium

Cette baisse, plus fréquente avec un traitement au Cisplatin ou au Carboplatin, se manifeste par de la fatigue, de la faiblesse musculaire, des tremblements ou par un problème cardiaque. Le contrôle du niveau de magnésium lors de l’apparition de ces symptômes est essentiel. On effectue son remplacement lors de déficit par voie intraveineuse ou orale.

 

SIADH : libération excessive d'hormone antidiurétique (ADH ou vasopressine) de l'hypophyse postérieure.

 

Cellules du système nerveux

Neuropathie périphérique

Cette neuropathie se manifeste le plus souvent par des picotements et des engourdissements des extrémités. Elle survient le plus souvent après des doses cumulatives de Cisplatin, d’Oxaliplatine, de taxanes ou de vincristine. Elle est le plus souvent réversible, mais les symptômes sont parfois de longue durée.

 

Ototoxicité

Cette toxicité se manifeste par du tinnitis et/ou une perte auditive. Le Cisplatin, les alcaloïdes de la Vinca, les taxanes et l’Oxaliplatine sont les agents le plus souvent incriminés.

 

Constipation

On en retrouve plus souvent avec les alcaloïdes de la Vinca, la vincristine et le vinorelbine. Des laxatifs stimulants sont à instaurer en début de traitement ou dès que ce problème se présente.
On peut même retrouver avec ces agents un syndrome de pseudo occlusion par neurotoxicité.

Cellules germinales du système reproducteur

Stérilité
Ménopause précoce

On peut retrouver une stérilité après une chimiothérapie avec, par exemple, les agents alkylants comme le chlorambucil, le busolfan ou la cyclophosphamide. Les fonctions germinales sont plus sensibles chez l’homme que la femme. Par contre, les fonctions hormonales sont plus sensibles à la chimiothérapie chez la femme et peuvent aller jusqu’à une ménopause prématurée.

* Liste non exhaustive
** Annexe 7. Traitements oncologiques