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Le deuil est un processus réactionnel normal, caractérisé par un chagrin plus ou moins intense, selon l’intensité des liens et des rapports avec la perte. Ce processus est actif, on parle même de travail de deuil. Il peut concerner le détachement d’une personne, d’un objet, d’une position, d’un lieu, etc. Étant un processus, il requiert du temps et implique un cheminement pour son intégration.

Fonction du deuil

Le deuil permet à la personne endeuillée de se libérer et de se réapproprier les projections et l’énergie investis dans cette relation. Tel que mentionné par J. Monbourquette, la souffrance peut servir à une croissance personnelle face au mystère de la vie et de la mort. Lorsque le moi personnel est brisé, il peut débuter une recherche de ses ressources intérieures menant à une meilleure connaissance de soi.

Buts de l’accompagnement

  • Faire émerger les émotions et les ambivalences face à la perte
  • Soutenir les réajustements face au quotidien et aux nouveaux rôles
  • Soutenir le réinvestissement face à l’avenir

Particularités

  • Pour que le processus de deuil débute, il faut que l’endeuillé ait réalisé la perte, en présence de déni
  • Une période de choc et de déni peut être nécessaire pour retrouver un équilibre surtout lors d’un décès subit
  • Il n’y a pas de temps déterminé pour vivre ou intégrer un deuil. Il est important d’exprimer ses émotions les premières semaines suivant  laperte. En général le processus peut se dérouler sur deux ans. La première année, le chagrin est plus aigu, lesévénements tels  qu’anniversaires, moments importants, sont vécus plus difficilement. La deuxième année et les années suivantes la répétition des temps forts tendent à rendre les souvenirs moins souffrants et à intégrer la perte avec plus de sérénité
  • Le deuil met en relief toutes les sphères de l’individu, les défis sont aux niveaux bio-psycho-sociaux, culturels ainsi que spirituels
  • Certains rituels peuvent aider la personne à couper le lien et trouver le sens de la perte
  • L’absence est souvent ressentie quelques semaines plus tard puisque les préparatifs funéraires, les démarches légales occupent  dans un premier temps une partie du vide. L’endeuillé se retrouve souvent seul quand les gens de son entourage reprennent leur quotidien. À ce moment, il peut ressentir qu’il doit cesser d’en parler et de pleurer, ce qui peut retarder ou bloquer le processus de deuil

Déterminants du deuil

Certains éléments déterminent et caractérisent un deuil. Parfois, il peut se compliquer ou devenir pathologique. Ces éléments servent de facteurs de risques. Le cheminement relié au deuil se fait de façon unique pour chaque personne, dépendamment de nombreux facteurs. Ces facteurs, Roger Régnier les a regroupés dans un tableau (voir figure I) nous permettant ainsi de mieux repérer un deuil qui peut se compliquer et devenir pathologique.

Facteurs déterminants du deuil

Tiré du tableau de Roger Régnier

Les manifestations normales du deuil

 

Indices normaux du deuil

Sentiments Chagrin, colère, révolte, anxiété, culpabilité, ressentiment,
insécurité, sentiment d’incompétence,
engourdissement émotif,
préoccupation intense du défunt,
isolement, soulagement,
sentiments ambivalents
Comportements Pleurs,soupirs, lamentations,
verbalisation.
perturbations du sommeil,
rêves et cauchemars,
perturbations des habitudes alimentaires,
fonctionnement automatique,
distractions,
recherche du disparu,
identification ou introjection,
hyperactivité, apathie,
dilution des types de conduite, retrait social,
évitement ou attachement aux symboles du disparu,
hostilité, amplification de la libido, propension aux accidents, propension à la toxicomanie
Manifestations
cognitives
État de choc, incrédulité,
confusion, « présence» du défunt,
hallucinations visuelles et auditives, solitude
Spirituel Colère envers Dieu et la vie, injustice, trahison,
abandon, incompréhension,
recherche de sens,
changer de croyances,
devenir plus croyant ou s’éloigner de ses croyances, révolte
Sensations physiques
Assèchement ou crispation dans la région laryngée,
serrement dans la poitrine,
tension ou crispation dans la région épigastrique,
vide abdominal, sudation,
palpitations, bouffées de chaleur,
vision brouillée, tremblements,
altération du goût ou de l’appétit,
troubles digestifs, diarrhée,
hypersensibilité au bruit,
céphalées, tension ou faiblesse musculaire, manque d’énergie,
hypertension, susceptibilité aux maladies, infections
   

Adaptation du tableau de Roger Régnier

 

Modèles théoriques de deuil

Modèles théoriques comparatifs du processus de deuil : Bowly, Kübler-Ross, Monbourquette

Etape Bowly Kübler-Ross Monbourquette
1ère étape Évitement
(État de choc, engourdissement)
Déni
(Pas moi !)
Résistance à la souffrance
(Choc, négation, blocage des émotions)
2e étape Prise de conscience de la perte
(Épisode très émotif où la personne en deuil reconnaît l’ampleur de la perte)
Colère
(Pourquoi moi ?)

Marchandage
(Pas maintenant !)

Expression des émotions, des sentiments
(Colère, peine, amour, libération)
3e étape Détachement
(Les souvenirs et les images s’estompent tranquillement)
Dépression
(C’est triste et difficile)
Relation à terminer
(Affaires à régler, adieux à exprimer)

Sens de la perte
(Découvrir l’aspect positif de la perte)

4e étape Résolution
(Le goût de vivre et de créer de nouveaux liens affectifs reviennent)
Acceptation
(Ça va !)
Pardon
(Niveau affectif)

Lâcher prise
(Détachement – niveau imaginaire)

Héritage
(Réappropriation des éléments positifs prêtés à l’autre)

Référence : L’infirmière du Québec, nov.-déc. 1995

Il existe plusieurs modèles théoriques nous apportant une vision différente pour mieux comprendre les diverses manifestations et mieux adapter nos interventions. Le cadre de référence que nous avons choisi est celui de J.Monbourquette parce qu’il nous permet d’explorer plusieurs outils de travail tels ; la visualisation, l’écriture et le rituel portant sur l’héritage.

Étapes du deuil selon Monbourquette et les interventions requises :

Résistance à la souffrance
Choc : hallucinations visuelles, auditives, tactiles
Déni : type intellectuel, émotive

  • Soutenir et guider la personne, état qui implique une prise en charge
  • Vérifier le réseau social afin de soutenir l’endeuillé (quelques jours)
  • Offrir les soins de base, alimentation, repos
  • Ne pas confronter la personne mais l’encourager à prendre soin d’elle

Expression des sentiments

Favoriser l’expression des émotions face au défunt (faire nommer)

  • Permettre l’expression des émotions contradictoires, l’ambivalence et la culpabilité
  • Faire raconter l’événement pénible ;
  • Utiliser le reflet et être attentif aux signes des charges émotives (voir relation d’aide)
  • Débuter par de petites séances et accorder des moments de repos

Révision des choses non finies

  • Se servir de l’imaginaire afin de boucler les choses restées en suspens avec le défunt;
  • Faire poser des gestes qui vont compléter les promesses, les dialogues inachevés, écrire une lettre, visiter le cimetière, créer un rituel
Trouver un sens à la perte
  • Amener l’endeuillé à se poser la question afin de prendre une distance émotive : quel est le sens de cette perte pour moi ?
  • Pister l’endeuillé sur son questionnement :
    • À quelle démarche es-tu initié ? Qu’est-ce que tu apprends sur toi ?

    • Quelles sont les nouvelles ressources que tu découvres en toi ?

Démarche de pardon et le lâcher prise

  • Il y a deux étapes; d’abord par une démarche du cœur, l’endeuillé peut faire les pardons nécessaires pour compléter sa libération. Cette étape ne doit pas être entreprise avant d’avoir liquidé le flot d’émotions ambivalentes et les non-dit. Elle ne doit pas être intellectualisée sinon elle n’atteindra pas son objectif de libération intérieure

  • Le laisser-partir utilise l’imaginaire, un rituel où l’endeuillé laisse le défunt disparaître et intégrer une autre forme compatible avec son nouveau vécu. Utiliser l’écriture ou toute autre forme où l’endeuillé sera à l’aise pour exprimer ses sentiments
Démarche vers l'héritage
  • Cette étape est de nature spirituelle, elle est en soi l’ultime étape de croissance dans le processus. Il faut d’abord avoir dépassé l’étape de négation, vivre les émotions, terminer les choses non finies, avoir trouvé un sens à sa perte et enfin avoir pardonné et l’avoir laissé partir. L’héritage se fait par un rituel qui sollicite tous les sens, ainsi toutes les facultés conscientes et inconscientes sont mises à contribution et bouclent le processus dans toute sa réalité. C’est en quelque sorte se réapproprier l’amour, l’énergie, les qualités, les talents qu’on avait déposés dans l’autre

  • L’endeuillé organise une cérémonie où on veille à ce qu’il exploite le plus ses sens; il est nécessaire d’avoir des accompagnateurs significatifs, cela témoigne d’une prise de position sur son nouveau devenir
    • Bougies, musique, fleurs et photos

    • L’endeuillé relate 4 à 6 qualités qui l’avaient attiré chez la personne aimée

    • Trouve des objets aptes à symboliser ces dernières
    • Lors de la cérémonie l’endeuillé se réapproprie chacune des qualités qu’il avait investies. Il récite à voix haute : Puisque nous sommes séparés… nom de la personne défunte… je reprends…nomme la qualité choisie… que je t’avais prêté(e), il y a… la durée de la relation…. et que tu as enrichi(e) aussi de ton propre… la qualité nommée.
    • L’héritier prend le temps de tenir l’objet près de son cœur et le dépose sur une table afin de continuer le rituel
    • A la fin les témoins confirment à l’héritier qu’il à bien traversé son deuil et que son engagement est complet

Noter que

Tout le long du processus, l’endeuillé doit prendre soin de lui; il faut sensibiliser l’entourage et l’encourager à soutenir ce dernier pendant plusieurs semaines.

  • Se reposer plusieurs fois par jour (l’émotivité utilise beaucoup d’énergie)
  • Respecter ses limites physiques
  • Prendre de petits repas réguliers et des collations soutenantes et augmenter l’hydratation
  • Faire de l’exercice physique sans se fatiguer
  • Se faire plaisir et s’entourer des gens qui nous soutiennent vraiment

Des périodes de chagrins refont surface et l’endeuillé sentira le besoin de se retirer par périodes. Il faut accepter ces étapes sans toutefois l’abandonner.

Souvent les réflexes de multiplier les activités afin de se distraire sont fréquents, la période de deuil requiert un cheminement intérieur, il faut équilibrer les périodes de distractions et de réflexions. Les trois premiers mois passés, l’entourage a repris ses activités, mais l’endeuillé ayant terminé les démarches de succession, se retrouve devant un vide et se sent coupable de parler du défunt ou de le pleurer. Le sentiment de solitude est très grand, la personne se sent délaissée par son entourage et c’est à ce moment-là que le deuil prend toute son ampleur.

Les critères de guérison selon Régnier
  • L’acceptation de la perte
  • La prise en charge de soi
  • L’intériorisation de la « présence » du défunt
  • La disparition complète des symptômes
  • L’actualisation des nouveaux modèles de soi et du monde
  • L’amélioration globale de la qualité de vie
  • La capacité de reformuler un sens à la vie
  • La capacité de réinvestir affectivement et socialement
Quatre grandes tâches sont à accomplir à travers le processus du deuil
  1. Vivre la douleur du deuil
  2. Accepter la réalité de la perte
  3. Se détacher émotionnellement de la personne décédée
  4. S’adapter à un environnement d’où le décédé est absent
Intégration du deuil

Indices d’intégration du deuil

Deuil intégré
  • Apprentissage
  • Développement continu
  • Adaptation aux options nouvelles, aux nouveaux modèles de soi et du monde
  • Ouverture de soi
  • Recouvrement des fonctions, de l’équilibre physique et psychologique
  • Adaptation
  • Détachement positif
  • Capacité d’assumer pleinement sa vie
  • Capacité de donner un sens à la vie
  • Meilleure qualité de vie dans sa globalité
Deuil non intégré
  • Fixation
  • Arrêt du développement ou régression
  • Non adaptation à la nouvelle réalité, peu d’investissement dans la vie
  • État dépressif prolongé
  • Retrait, repli
  • Persistance de troubles physiques ou psychiques
  • Fonctionnement difficile
  • Désorganisation prolongée
  • Pessimisme, amertume, regrets
  • Sentiment de vide et d’inutilité
  • Difficulté à donner un sens à la vie
  • Souffrance prolongée
  • Sentiment de privation et d’incomplétude

Tiré du tableau de Roger Régnier