Augmentation des processus intracellulaires

LES RECEPTEURS NMDA ET ... LES RECEPTEURS NON-NMDA:
LEURS ROLES DANS LE "MAINTIEN" D'UNE HYPERACTIVATION DES DENDRITES CENTRAUX

 
Comment peut donc se faire ce "maintien" d'une hyperactivation neuronale centrale ?
 
Sur le plan de la biochimie neuronale, cette irritabilité membranaire "facilitée" au point de devenir "spontanée ou autodéclenchable" provient de l'arrivée massive et continue d'ions Ca++ à l'intérieur des neurones centraux ce qui a comme conséquence d'entrainer un taux anormalement élevé de Ca++. Lorsque le Ca++ migre de façon massive à l'intérieur des boutons dendritiques et du corps cellulaire des neurones nociceptifs centraux, il active une cascade d'activités biochimiques qui concourent toutes à l'accentuation des douleurs.
 
De nombreuses structures et de nombreux processus intracellulaires sont reconnus comme dépendants du Ca++ intracellulaire, parmi ceux-ci figurent:
 
• le réticulum endoplasmique, responsable entre autre d'assurer les réserves de Ca++ intracellulaires et qui sous l'influence d'une augmentation de Ca++ en provenance de l'ouverture des NMDA inonde l'espace intracellulaire d'une plus grande quantité de Ca++ encore ce qui a pour effet de contribuer à un effet de cercle vicieux en regard de l'activation des différentes cascades biochimiques dépendants du  Ca++ déjà en cours,
 
• l'augmentation de l'activité de la Phospholipase A qui se trouve nettement accentuée, ce qui entraîne une augmentation de production et de libération d'acide arachidonique. Cet acide arachidonique migre par la suite à partir du corps cellulaire de la cellule centrale vers le bouton présynaptique où il fait ensuite son entrée. Il deviendra le substrat de la cyclo-oxygénase activée à son tour par le NO ce qui entraînera l'augmentation de production de prostaglandine (PG),
 
• l'augmentation de l'activité du complexe mGLU-R - ProtG ce qui augmente l'activation de la Phospholipase C qui augmente alors sa production de DAG (diacylglycérol) et IP3 (inositol triphosphate). L'augmentation d'IP3 active à son tour le Réticulum endoplasmique qui inonde encore plus l'espace intracellulaire d'une plus grande quantité de Ca++ encore et l'effet de cercle vicieux ne fait que s'accentuer,
 
• l'augmentation de l'activité de la Protein kinase C, ce qui a pour effet d'augmenter la phosphorylation des canaux AMPA, Q/K, NMDA et donc l'activité de ces mêmes récepteurs ce qui aura pour effet d'amener encore plus de Ca++ dans le corps cellulaire du neurone central et donc d'augmenter encore plus l'activité de la NO synthétase,
 
• l'augmentation de l'activité de la Protein kinase dépendant de l'enzyme Ca++/Ca-Modulin (CaM) ce qui aura pour effet d'augementer encore plus l'activité de la NO synthétase,
 
• l'augmentation de l'activité de l'Ornithine decarboxylase (ODC) ce qui aura pour effet d'augmenter la production de bioamines (polyamines). Tout comme pour l'acide arachidonique, ces bioamines (polyamines) seront libérées en dehors du corps cellulaire du neurone central et migreront vers l’espace synaptique où ils se fixeront sur les canaux NMDA sur un site qui leur est spécifique,
 
• l'activité de certaines Protéases et Endonucléases présentes dans le noyau. L'hyperactivation de ces différents enzymes aura pour effet d'accélérer la dégénérescence cellulaire et de mener à la mort cellulaire (apoptose) de certains neurones centraux et de certains interneurones,
 
• l'augmentation de l'activité des mitochondries ce qui aura pour effet de mener à une accélération de la dégénérescence mitochondriale et donc à la mort cellulaire (apoptose) de certains neurones centraux et de certains interneurones,
 
• l'augmentation de l'activité de la NO synthétase ce qui aura pour effet d'entraîner à l'intérieur du corps cellulaire des neurones centraux une importante production d'une substance gazeuse, le monoxyde d'azote (NO), qui agira comme substance "facilitatrice" ou "amplificatrice" pour de nombreuses réactions biochimiques.
           
Il ne sera donc pas étonnant que l'ensemble de ces réactions mènent à un épuisement cellulaire et à une mort cellulaire (apoptose) à plus ou moins court terme tellement l'hyperactivation est intense et continue. On assistera alors au dérèglement complet d'une partie de l'architecture des différentes structures nociceptives et cela touchera autant les neurones nociceptifs que leurs constituants intra-cellulaires, autant les neurones modulateurs que leurs constituants intra-cellulaires. Ces différentes transformations concoureront aux changements dits de plasticité dont il sera fait mention ultérieurement. (Voir: LES LESIONS NERVEUSES: LES DIFFERENTES ANOMALIES PATHOPHYSIOLOGIQUES A MOYEN ET LONG TERME / LESIONS NERVEUSES: PROCESSUS DE REGENERATION NEURONALE ET CONCEPT DE PLASTICITE NEURONALE)
 
A travers ces processus, il se trouve deux enzymes "kinase" qui sont particulièrement impliquées dans l'hyperactivation des différents métabolismes. Ces kinases ont pour effet d'augmenter la production de substances dites "seconds messagers" (NO, cGMP et autres) dont l'effet, "en excès" devient toxique pour la cellule. En fait, ces deux enzymes (Ca++/Calmodulin kinase et kinase C) viennent  faciliter le travail des récepteurs NON-NMDA en aidant à la conservation d'un voltage transmembranaire permettant de garder les récepteurs NMDA ouverts. De cette façon, l'instabilité électrique des membranes des neurones centraux nociceptifs s'en trouve accentuée "de façon excessive" et l'hyperirritabilité est ainsi créée.
 
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Mais il y a pire encore. Lorsque l'usine métabolique fonctionne à plein régime et que l'effet facilitateur est acquis au niveau post-synaptique, les neurones centraux se mettent à produire de façon effrénée du monoxyde d'azote (NO) ce qui aura pour conséquences d'augmenter des nombreuses réactions biochimiques. Le NO agit à l'intérieur même du corps cellulaire où il a été produit mais il est aussi libéré à l'extérieur du corps cellulaire des neurones nociceptifs centraux où il vient agir "à rebours" sur les terminaisons pré-synaptiques et les cellules gliales. Cette substance gazeuse agit alors un peu comme un NT mais "avec effet rétrograde". Lorsque le NO se trouve en présence des différentes substances et structures sur lesquels il agit, il active une intense cascade métabolique. Les substances et structures sur lesquels le NO exerce ses effets mobilisateurs sont nombreuses et témoignent de l'ubiquité de cette substance. Ainsi, le NO provoque
 
• une activation accrue de la cyclo-oxygenase intra-neuronale autant au niveau du corps cellulaire de la cellule centrale qu'au niveau du bouton pré-synaptique ce qui a pour effet d'entraîner une augmentation de la production de PG intra-neuronale,
• une modification de certains gènes dans le noyau de même que l'expression de ceux-ci,
• une activation très marquée de l'activité de la Guanine cyclase-S,
• une augmentation aussi très marquée de l'activité des Ez et des structures dépendant du c-GMP à la fois dans le corps cellulaire, le bouton pré-synaptique et à la fois dans la cellule gliale.
 
En fait, un des effets très importants du NO dans les trois structures soient le corps cellulaire des neurones centraux, les boutons pré-synaptiques et les cellules gliales s'exerce par une augmentation marquée de l'activité de la Guanylyl cyclase-S menant à un accroissement proportionnel de formation de c-GMP. La cascade biochimique se poursuivant, ce seront les Ez et les structures dépendant du c-GMP qui seront ensuite activés dans les trois structures soient le corps cellulaire des neurones centraux, les boutons pré-synaptiques et les cellules gliales. Dans le bouton pré-synaptique, cette activation mènera à l'augmentation de la production et de la libération de GLU, sP et d'au moins un autre NT nociceptif soit le CGRP et donc à une plus grande accentuation de la neurotransmission nociceptive donc à plus de douleur.
 
Les conséquences à l'intérieur du bouton pré-synaptique sont d'accentuer, de prolonger et pire encore de maintenir la libération accrue de glutamate. Or, l'hyperlibération de glutamate est responsable de l'hyperactivation des membranes post-synaptiques. En langage imagé, un processus infernal vient de prendre place. Le cercle vicieux est ainsi "bouclé" parce que l'hyperactivité du neurone central concourt à l'hyperactivité du bouton pré-synaptique qui est aussi "fouetté" par les cellules gliales présentes dans l'environnement immédiat des boutons pré-synaptiques; le tout accentue encore plus l'hyperactivité du neurone central qui ...
 
L'activation des récepteurs NMDA se fait surtout par les stimulations nociceptives en provenance des fibres C mais les récepteurs NMDA peuvent aussi répondre aux stimulations en provenance des autres fibres en autant bien sûr que celles-ci libèrent du glutamate comme NT. En fait, une large proportion des fibres sensitives périphériques A bêta et A delta possèdent la capacité d'émettre du "glutamate" et de "l'aspartate" comme NT en situation d'"hyperactivité". En situation d'hyperstimulation nociceptive les stimulations non-nociceptives, génératrices de glutamate, peuvent alors concourir au processus de neurotransmission nociceptive puisque leurs contributions deviennent alors suffisantes pour déclencher des douleurs.
 
Un grand nombre de neurones intermédiaires (interneurones et cellules pédonculées (Stalk Cells) au niveau de la corne postérieure peuvent aussi libérer du glutamate parmi leurs NTs. Leur contribution ne peut être commentée plus en détail actuellement.