Introduction
Il s'agit d'une patiente de 82 ans, atteinte d'un cancer du poumon non oat-cell (volumineuse masse lobe supérieur droit) diagnostiquée en 2003 (T3, N0, M0). Après investigation, elle a subi, cette même année (automne 2003), une lobectomie supérieure droite avec exérèse des 3ième et 4ième côtes. Il y avait, lors de la chirurgie, un envahissement de la plèvre viscérale et pariétale, ainsi que des tissus mous avoisinants. L'examen ganglionnaire fut négatif. Elle a reçu, par la suite, une radiothérapie adjuvante au niveau du thorax postérieur. Dans les mois qui ont suivi, la patiente a toujours présenté des douleurs thoraciques post-thoracotomie, assez difficiles à contrôler. En septembre 2004, elle a été réévaluée car elle présentait alors, une détérioration importante de l'état général et une dorsalgie accentuée. Elle fut hospitalisée. Lors de son hospitalisation, elle présenta une augmentation de sa dorsalgie ainsi qu'une parésie légère des membres inférieurs, sans autre symptôme neurologique. Le bilan radiologique démontra une volumineuse récidive pulmonaire droite avec envahissement des corps vertébraux D5-D6 et compression médullaire à ces niveaux.
Clinique
Signes et symptômes
- Il faut savoir que 83 à 95 % des malades auront ressenti des douleurs au dos progressives précédant le diagnostic de compression médullaire et ce pour plusieurssemaines. Chez les patients connus avec des métastases osseuses, tout changement au niveau des caractéristiques de leur douleur, doit nous faire soupçonner la possibilité d'une compression médullaire et mérite une réévaluation clinique et radiologique.
- Nos soupçons seront d'autant plus grands si l'intensité de cette douleur augmente rapidement, si cette douleur est pire en décubitus dorsal, s'intensifie aux manoeuvres de Valsalva et irradie au niveau de certains dermatomes.
- Au questionnaire et à l'examen clinique, on doit rechercher tout déficit neurologique. Par contre, l'absence de symptômes ou signes neurologiques n'exclut pas la présence d'un envahissement de l'espace épidural qui pourra éventuellement entraîner une compression de la moelle épinière.
- Au niveau moteur, on peut retrouver une faiblesse des membres inférieurs qui peut être symétrique ou asymétrique et généralement flasque. Des signes pyramidaux peuvent être présents tels que hyper réflexie, signe de Babinski (réflexe cutané plantaire en extension).
- Au niveau sensitif, on peut identifier un déficit sensitif symétrique qui se localise généralement deux dermatomes au-dessous du niveau anatomique de la lésion qui fait compression.
- Les réflexes peuvent être absents ou plus vifs que normalement.
- Le contrôle sphinctérien peut initialement être préservé.
- À noter que, dans les syndromes de compression médullaire et/ou de la moelle épinière, la faiblesse est déjà présente dans 60 à 85 % des cas au moment du diagnostic et que chez les 2/3 des patients, l'atteinte motrice est sévère au point de les rendre non ambulants. Ceci est inquiétant puisque l'on sait que le statut neurologique avant le traitement semble de loin le prédicteur le plus puissant de la fonction après le traitement.
Investigation
Rayons-X - Paumon – 19 octobre 2004
Séquelles de thoracotomie droite et déviation du médiastin vers la droite. La plag pulmonaire droite est difficilement évaluable à cause de la déviation médiastinale. On ne peut identifier adéquatement l'arc postérieur de la 2ième côte droite. Il y a lyse possible à ce niveau.
La transparence de la plage pulmonaire gauche est normale.
CT-Scan - Thorax sans infusion – 23 octobre 2004
Lésion néoplasique de 8 x 6 cm intéressant la jonction du tiers supérieur et moyen, en postérieur de la plage pulmonaire droite. On note également une lyse costale ainsi que vertébrale au niveau D4, D5, D6. Cette lésion semble se prolonger jusqu'au canal rachidien.
Résonnance magnétique - Thorax – 27 octobre 2004
Examen limité à une seule incidence sagittale en raison de l'état de santé de la patiente. Cette unique incidence nous permet toutefois de déterminer qu'il existe une atteinte néoplasique des corps vertébraux D5 et surtout D6. L'atteinte est surtout marquée du côté droit, avec destruction des pédicules, des apophyses articulaires et extension de lanéoplasie jusqu'au niveau des apophyses épineuses et entre ces dernières.
Il y a également atteinte des côtes correspondantes et extension de la tumeur dans les tissus mous avoisinants. Il existe également une extension épidurale de la lésion néoplasique responsable d'une sténose spinale et d'une compression médullaire en D6.
Conclusion
- Toute douleur vertébrale inexpliquée, rapidement exacerbée ou difficile à contrôler, chez un patient atteint de cancer, doit nous faire penser à une possible compression médullaire imminente. Il faut savoir, de plus, que 20% des compressions spinales seront les manifestations initiales d'un cancer.
- La détection précoce des symptômes et des signes de compression médullaire ainsi qu'une investigation appropriée et rapide ont pour but de tenter de réduire, par un traitement de radiothérapie d'urgence ou une chirurgie de décompression, les déficits neurologiques dévastateurs, paraplégie, incontinence, de cette complication relativement fréquente des cas de cancers. La compression
médullaire survient chez 5-10% des patients atteints de cancer.