Compression médullaire L2

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Introduction

Il s'agit d'une patiente de 56 ans, atteinte d 'un cancer du sein depuis plusieurs années. Depuis deux ans, elle présente des métastases osseuses douloureuses au niveau vertébral et costal. Elle a reçu de la radiothérapie au niveau de plusieurs de ces sites. Elle est actuellement sous traitement de chimiothérapie et reçoit des biphosphonates IV de façon régulière, à tous les mois. Depuis les dernières semaines, elle a noté une exacerbation de ses douleurs au niveau lombaire.


Clinique

Signes et symptômes
Il faut savoir que 83 à 95 % des malades auront ressentides douleurs au dos progressives précédant le diagnostic de compression médullaire et ce pour plusieurs semaines. Chez les patients connus avec des métastases osseuses, tout changement au niveau des caractéristiques de leur douleur, doit nous faire soupçonner la possibilité d'une compression médullaire et mérite une réévaluation clinique et radiologique.


- Au questionnaire et à l'examen clinique, on doit rechercher tout déficit neurologique. Par contre, l'absence de symptômes ou signes neurologiques n'exclut pas la présence d'un envahissement de l'espace épidural qui pourra éventuellement entraînerune compression de la queue de cheval.

- Au niveau moteur, on peut noter une faiblesse au niveau des membres inférieurs qui peut être asymétrique. On ne retrouve habituellement pas de signes pyramidaux tels que réflexes vifs, clonus, signe de Babinski.

- Au niveau sensitif, on peut identifier un déficit sensitif auniveau des membres inférieurs et de la région du périné (hypoesthésie ou anesthésie en selle).

- Les réflexes pourront être diminués et asymétriques. Des troubles sphinctériens peuvent être notés.

- À noter que, dans les syndromes de compression de la moelle et/ou de la queue de cheval, la faiblesse est déjà présente dans 60 à 85 % des cas au moment du diagnostic et que chez les 2/3 des patients, l'atteinte motrice est sévère aupoint de les rendre nonambulants. Ceci est inquiétant puisque l'on sait que le statut neurologique avant le traitement semble de loin le prédicteur le plus puissant de la fonction après le traitement (Schiff 2003).

 

Investigation

Rayons-X - Abdomen – juin 2004
Présence d 'un drain se localisant dans la cavité pleurale inférieure droit (Pig Tail) et épanchement pleural droit léger à modéré. Affaissement partiel de L2 et aspect dense des pédicules surtout du pédicule droit nous laissant soupçonner une atteinte métastatique de cette vertèbre. Le reste de l 'examen est sans particularité significative.

Colonne dorsale - septembre 2004

Aspect légèrement cunéiforme et relativement dense de D12 et D5 avec affaissement de 40% de la vertèbre D5. Léger affaissement de D6 et légère densité associée. Arthrose dorsale étagée. Affaissement significatif de L2 qui est également dense. Opinion : Atteinte métastatique probable de D5, D6, D12, L2.

 

Rayons-X - Colonne lombo-sacrée - septembre 2004
Affaissement partiel de L2 avec aspect scléreux. On ne note pas d'autres affaissements au niveau du rachis lombaire. On soupçonne un affaissement partiel de D12, non spécifique. Une étude du rachis dorsal est donc suggérée. Note : 30-50% du minéral osseux doit être atteint pour donner une image radiologique positive.

 

Imagerie nucléaire - Scintigraphie osseuse - mai 2003
Activité légèrement accrue en regard du tibia droit proximal, dans sa portion externe. Impression : L'aspect du tibia droit proximal n'est pas spécifique et l'on ne peut pas conclure à la présence de lésion métastatique. Toutefois, étant donné le contexte, une corrélation radiologique peut être effectuée. Note : Il arrive qu'une zone de captation soit de faux positif (fracture , arthorose , ...)

 

Scintigraphie osseuse - Janvier 2004
En comparaison avec la scintigraphie précédente :
- Importante progression en étendue et en intensité d'une lésion pré-existante à D6 environ. - Apparition d'une hypercaptation intense et étendue à L2 environ avec apparition de plusieurs foyers d'intensité légère à modérée dans le restant du rachis, en particulier au niveau approximatif de D9 à droite, D10–D11 à gauche, D12 à droite et possiblement au tiers moyen du rachis cervical et également au niveau de la région C7-D1.Apparition de plusieurs foyers d' hypercaptation d'intensité légère à modérée dans le gril costal,mal définis, en particulier dans l'arc moyen dela 3ième et possiblement de la 4ième côte gauche, et dans l'arc antéro-latéral des 5ième, 6ième côtes droites, dans l'arc moyen des 7ième et 9ième ou 10ième côtes droites et possiblement dans l'arc postérieur gauche de la 6ième ou de la 7ième côte. Impression : Apparition de plusieurs foyers d'hypercaptation d'intensité variable aux sites sus-mentionnés, ce qui est suspect d'une maladie pluri-métastatique osseuse étant donné l'évolution,le nombre de lésions et leur distribution. Suggérons une corrélation radiologique du gril costal ainsi qu'une résonance magnétique du rachis pour confirmer le diagnostic d'une maladie métastatique à des métastases et non à des fracture sostéoporotiques, par exemple. Note : La scintigraphie osseuse est plus sensible que le film simple pour détecter les métastases osseuses. Par contre, la scintigraphie ne permet pas de visualiser s'il y a présence ou non d'une tumeur au niveau del'espace épidural. De plus, lorsque qu'il y a destruction osseuse massive et qu'il n'y a plus de remodelage osseux, la scintigraphie peut être faussement négative.

 

Résonance magnétique - Rachis, sans infusion - Novembre 2004
Nous n'avons pu pratiquer toutes les séquences, la patiente étant incapable de demeurer à l'intérieur de l'aimant. On observe des lésions lytiques disséminées à l'ensemble du rachis cervico-dorsolombaire. Il existe des affaissements cunéiformes de D1, D5 et L2. À ce niveau, on note un débordement de quelques millimètres du rebord postérieur de L2 dans le canal rachidien. Note : La résonance magnétique est l'examen de choix pour dépister et évaluer l'étendue d'un envahissement néoplasique de l'espace épidural. Idéalement, l'examen devrait couvrir toute la colonne puisque dans 1/3 des cas, des métastases épidurales seront retrouvées à plus d'un site (Schiff 2003).

 

Conclusion

Toute douleur vertébrale inexpliquée, rapidement exacerbée ou difficile à contrôler, chez un patient atteint de cancer, doit nous faire penser à une possible compression médullaire imminente. Il faut savoir, de plus, que 20 % des compressions spinales seront les manifestations initiales d'un cancer (Schiff 2003). La détection précoce des symptômes et des signes de compression médullaire ainsi qu'une investigation appropriée et rapide a pour but de tenter de réduire, par un traitement de radiothérapie d'urgence ou une chirurgie de décompression, les déficits neurologiques dévastateurs, paraplégie, incontinence, de cette complication relativement fréquente des cas de cancers. La compression médullaire survient chez 5-10% des patients atteints de cancer (Caraceni et al. 2005).