L’oxygène

Des milliers de patients avec maladies cancéreuses ou non cancéreuses sont hospitalisés en soins palliatifs et reçoivent de l’oxygène dans le but de les aider à mieux respirer. Ses effets sur la dyspnée au repos des patients atteints d’un cancer ou d’une BPCO sont controversés. La dyspnée est l'un des symptômes les plus fréquemment rencontrés dans les cancers avancés après la douleur et les problèmes de dénutrition. L'origine de la dyspnée est encore peu claire et il est important de réaliser qu'elle est un sentiment conscient et que l'état émotionnel du patient va influencer sur l'évaluation de son intensité. C'est de ce fait le symptôme le plus éprouvant pour le patient, sa famille et les soignants.

«Offrir de l’oxygène quand un malade commence à présenter une difficulté respiratoire est devenu le standard à plusieurs endroits, bien que cette pratique ne soit pas basée sur une preuve scientifique rigoureuse». 

Une étude de Abernathy dans le Lancet en 2013 arrive à une conclusion qui confirme ce qu’on savait déjà : 50 % des patients ne retirent aucun bénéfice de cette intervention, et parmi la moitié qui en retirera un effet positif, il n’y a aucune différence de les exposer à de l’oxygène pur ou tout simplement à l’air ambiant! La qualité du bénéfice perçu sera semblable pour les deux interventions.

Toutefois, il ne faut pas oublier que la dyspnée est à la fois sensorielle et émotionnelle et même si corriger une saturométrie basse en oxygène ne corrige pas la dyspnée, l’impression subjective de mieux respirer que ressent le patient est tout aussi importante lorsque c’est le cas.

Tout geste thérapeutique a un effet placebo ou nocebo généré par celui qui le pratique et par celui qui le reçoit. Certains en bénéficient, d’autres pas, sans qu’il soit possible de prédire la réponse. Il n’y a pas d’étude chez le patient insuffisant cardiaque stade IV. Il est donc recommandé d’effectuer un essai thérapeutique si on veut vraiment employer l’oxygène. Son indication est donc posée sur une base clinique, indépendamment de la SaO2.

Son administration est attentivement étalonnée chez le patient BPCO, car surcorriger une hypoxie enlèvera au patient un stimulus important responsable de l’entraînement respiratoire et, en conséquence, un ralentissement de la fréquence respiratoire favorisera une augmentation de PCO2; le résultat sera contraire à l’effet recherché.

Le bénéfice de l’oxygénothérapie est évalué le plus objectivement possible (échelle d’évaluation), afin d’éviter toute dépendance inutile lorsque le patient n’en profite pas.

Les lunettes nasales sont mieux tolérées que le masque.

Au total, l'oxygène ne doit pas être présenté à tous les patients cancéreux dyspnéiques comme une panacée. Si l'O2 n'est pas toujours justifié sur le plan médical, son indication est souvent psychologique, voire placebo, pour le malade, sa famille et parfois le médecin. Il doit être prescrit chaque fois que le patient en fait la demande, car il sécurise le patient et il est difficile de le convaincre qu'il ne sert à rien, tant qu'il n'en a pas lui-même fait la preuve.