L’approche nutritionnelle en fin de vie

La faim

Mourir en ayant faim serait d’une souffrance et d’une cruauté innommable; il apparaît à la lecture de la littérature que ces patients en fin de vie n’ont en général pas faim.

Le jeûne induit, comme on l’a vu, une production de corps cétoniques qui auraient un effet anorexique central.

À l’inverse, les apports d’hydrates de carbone interrompant le jeûne entraînent une sévère sensation de faim.

Comme pour toute autre démarche thérapeutique, il faut regarder le rapport entre les bénéfices du geste et les contraintes qui s’ensuivent.

Le pronostic de vie est important et les notions de qualité de vie et de longueur de vie doivent être inventoriées.

Les besoins fondamentaux de plaisir et de convivialité sont-ils encore présents? Les notions de calories sont futiles.

À ce moment de la vie, la nutrition revêt donc plus un aspect psycho-social qu’une valeur alimentaire en soi. Quels sont les buts recherchés?

Diminuer l’asthénie? Renforcer la lutte infectieuse? Améliorer les plaies? Augmenter l’autonomie par augmentation de la masse musculaire?  Réconfort symbolique et confort émotionnel? Éviter les complications s’il existe une certaine espérance de vie?

Diminuer la sensation de faim si elle est présente?

L’appui d’une équipe multidisciplinaire est primordiale.

Discuter de nutrition dans le plan thérapeutique se doit d’être partie d’une démarche globale et être en phase avec les autres traitements; en faire le centre d’intérêt à la dernière étape de la maladie peut créer beaucoup d’attente de la part des malades et de leur famille et être source de tracas, plutôt que de bonheur.

D’un point de vue médical, l’inappétence et la nausée sont des symptômes qui entraînent la dénutrition et la malnutrition. La correction de la nausée et de l’inappétence pourra parfois ré-entraîner un certain désir de manger et une correction des réactions biochimiques qui deviendraient délétères et ainsi restaurer un état global de bien-être grâce à certains médicaments.

Forcer une personne présentant de la nausée à manger ne viendrait pas à l’esprit de grand monde si le pronostic est à court terme ou à moyen terme. Qu’en est-il de moyens artificiels?

Comme on l’a vu, les mécanismes biochimiques qui se mettent en branle lors d’un jeûne sont des moyens de défense de l’organisme pour traverser une situation qui doit être temporaire. Il s’agit de gagner du temps pour guérir ou améliorer la cause primaire dangereuse pour la survie. Le malade vit sur des réserves qui ne sont pas éternelles. Devons-nous suppléer?

Dans le cas des cancers plus spécialement, ou d’autres maladies à pronostic réservé, qu’on en soit à un stade intermédiaire ou à un stade très avancé de la maladie, la nutrition et l’hydratation deviennent des enjeux importants au fur et à mesure de l’évolution; enjeux pas tant médicaux que éthiques avec un potentiel de confrontation dans la relation thérapeutique.