Les douleurs compliquées d'une participation "soutenue" du système nerveux autonome sympathique

Autrefois appelée dystrophie sympathique réflexe ou causalgie, les douleurs compliquées d'une participation du système nerveux autonome sympathique ou "sympathetically maintained pain" sont des douleurs dans lesquelles l'activité du système nerveux autonome sympathique joue un rôle clé. Cette participation peut cependant se faire à divers degrés. Il arrive souvent que ce ne soit que lorsque le degré de participation sympathique est avancé que l'on reconnaisse cet état de fait, le diagnostic de cette participation demeurant alors insoupçonné pendant relativement longtemps.

En situation physiologique normale, l'activité sympathique ne possède aucun effet sur les nocicepteurs alors que l'activation des nocicepteurs induit pour sa part une accentuation des influx sympathiques dans les dermatomes où les nocicepteurs sont activés. Bien que les douleurs compliquées d'une participation "soutenue" du système nerveux autonome sympathique ("sympathetically maintained pain") ne soient encore qu'incomplètement définies, ce syndrome peut être compris comme une prise de contrôle des nocicepteurs par le système sympathique devenu hyperactif dans certaines régions. En fait, tout se déroule comme si le système nerveux sympathique prenait le contrôle de l'activité algésique dans une région donnée, avec en même temps, des conséquences à deux niveaux:

  • au niveau des régions synaptiques de la corne postérieure, l'hyperstimulation sympathique augmente le nombre d'influx nociceptifs y arrivant avec des conséquences déroutantes sur la multi-convergence puisque les fibres centrales (les WDR) voient leurs stimulations devenir erratiques et s'amplifier de façon extrêmement importante et tout aussi déroutantes sur les NMDA puisque l'augmentation du nombre d'influx arrivant sur les fibres centrales entraîne le "réveil" i.e. l'activation des récepteurs NMDA.
     
  • au niveau vasculaire, l'hyperactivité adrénergique produit de l'ischémie locale avec ses conséquences ultérieures soit inflammation et plus tard fibrose tissulaire. Cette ischémie locale provient de l'alternance répétée de vasoconstriction soutenue commandée par l'hyperactivité sympathique à laquelle fait suite une vasodilatation secondaire découlant de l'ischémie focale devenu tellement importante que les différentes structures sous gouverne du SNAS ne peuvent plus répondre à l'hyperstimulation sympathique. Ces alternances répétées de vasonconstriction/vasodilatation sont responsables de l'apparition de nombreuses substances inflammatoires et algogènes qui entraînent à leur tour la sensibilisation de milliers, voire de millions de nocicepteurs présents dans la région ischémique.

L'hyperactivité du système nerveux sympathique joue un rôle tellement important dans les mécanismes pathophysiologiques des douleurs compliquées d'une participation du système nerveux autonome sympathique ou "sympathetically maintained pain" qu'une bonne part du traitement visera à tenter de bloquer cette hyperactivité.

Etrange pathophysiologie, s'il en est une. A première vue, on a donc l'impression que le message douloureux AFFERENT (de la périphérie vers la région centrale), transporté par les fibres nociceptives, aurait pu déclencher une réponse réflexe EFFERENTE (de la région centrale vers la périphérie) du système nerveux autonome dans le ou les mêmes dermatomes où la douleur est perçue et "garder le contrôle" de cette réponse réflexe. C'est en fait ce qui se produit pour le déclenchement mais c'est probablement le contraire pour le contrôle. Cette réponse EFFERENTE du système nerveux autonome se comporte un peu comme si elle allait prendre le contrôle de la douleur, le phénomène de douleur sous gouverne du SNAS devenant pratiquement "autosuffisant et autodéclenchant" puisque c'est alors le SNAS qui prend la gouverne des nocicepteurs, causant de cette manière un cercle vicieux qui ne va souvent qu'en s'amplifiant.

Chez les personnes atteintes de cancer, cette hyperactivité "idiopathique", dans un ou des dermatomes où des lésions nerveuses ont déjà été produites, pourrait bien être, à l'occasion, le tout premier signe avant-coureur du subtil processus d'infiltration tumorale y prenant place.

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