Le phénomène de sensibilisation

Deux caractéristiques électrophysiologiques très particulières des nocicepteurs ont été discutés jusqu'à maintenant:

  • un seuil de dépolarisation élevé pour les stimuli naturels en comparaison des autres types de récepteurs dans le même milieu. Ceci fait en sorte que les stimuli normaux i.e. "non douloureux" comme le fait de toucher la peau ne puisse pas provoquer de douleur en temps normal. Cette caractéristique découle de la participation de certains canaux K+ spécifiques et du seuil d'activation relativement élevé des nocicepteurs,
  • une tendance à augmenter leur fréquence d'influx suite à un stimulus douloureux prolongé i.e. produire de plus en plus d'influx douloureux en contexte de situations "agressantes" particulières sans pour autant le faire de façon proportionnelle (Voir: LE PHENOMENE DE DEPOLARISATION "MEMBRANAIRE" ET LE SEUIL D'ACTIVATION). Deux de ces circonstances "agressantes" sont connues depuis longtemps en recherche clinique
    • les stimuli répétitifs
    • les stimuli de plus en plus élevés en intensité.

C'est donc dire que les nocicepteurs prennent un certain temps avant de commencer à réagir mais qu'une fois la production d'influx débutée, ils ont la capacité d'augmenter leur fréquence d'activation suite à des stimuli répétitifs ou suite à des stimuli de plus en plus intenses.

En fait, les nocicepteurs savent faire preuve d'adaptation mais d'une adaptation qui n'est pas toujours au bénéfice de la personne qui a mal. Ainsi, les nocicepteurs peuvent voir leur seuil d'activation s'abaisser pour la peine en certaines situations rendant du même coup leur activation plus facile. Dans ces circonstances, même leur réponse en terme de fréquence d'influx peut se trouver en même temps augmentée. Cet abaissement du seuil d'activation peut même conduire à ce qui semble être une activité spontanée i.e. une activation spontanée, donc à la création d'influx nociceptif spontanés sans stimulations douloureuses évidentes.

ANIMATION 28.1
 

Cet ensemble de phénomènes porte le nom de "sensibilisation" et sera illustré plus loin sur la base des mécanismes inflammatoires menant à la présence des substances "algogènes" dans les régions "lésées". (Voir: L'ACTIVATION "PRIMAIRE": ACTIVATION ET SENSIBILISATION DES NOCICEPTEURS)

La fatigue chez les humains joue un peu ce rôle de sensibilisation puisqu'alors l'intolérance, les sauts d'humeur, les colères impulsives sont à risque d'éclater au moindre stimulus irritatif qui survient. Le phénomène de sensibilisation ne s'arrête donc pas avec les nocicepteurs! On dit alors que le seuil de tolérance est abaissé et quand la colère éclate, elle est souvent d'intensité et de durée au-delà de la norme usuelle, il en est ainsi pour les nocicepteurs.

Dans d'autres circonstances, suite à des stimuli répétitifs de plus en plus élevés en intensité, l'adaptation se fera par une élévation considérable du seuil d'activation. Il faudra alors des stimuli nociceptifs beaucoup plus intenses qu'à l'habitude (suprathreshold stimuli) pour atteindre le nouveau seuil d'activation. Les conséquences cliniques de ces changements seront néfastes de nouveau pour la personne qui a mal (Voir: HYPERPATHIE DANS: UN LEXIQUE "DOULOUREUX" ). On ne parlera pas alors de sensibilisation mais d'adaptation des nocicepteurs.

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