4. Votre patiente a été traitée pour un cancer du sein : comment la suivre par la suite et reconnaître les recidives si elles se présentent ?

  1. Le soutien psychologique et l’information à donner à la patiente

    Un soutien psychologique peut être proposé à celles qui en ressentiraient le besoin; plusieurs organismes ou établissements impliqués en oncologie offrent ce service. Pour connaître ces ressources, le médecin de famille peut communiquer avec l’infirmière pivot en oncologie de sa région.*

    Documents de référence :
    http://www.msss.gouv.qc.ca/sujets/prob_sante/cancer/index.php?documents_reference 
    Intervenant_pivot_en_oncologie.pdf

    Le support et le suivi par le médecin de famille sont importants pour la patiente atteinte d’un cancer du sein compte tenu du fait que ce cancer fait peur et touche à l’image corporelle d’une femme. Un soutien psychologique doit être proposé à celles qui en ressentiraient le besoin. Certains organismes ou établissements impliqués en cancer offrent ce service. Pour connaître ces ressources, le médecin de famille peut communiquer avec l’infirmière pivot en oncologie de sa région.

    Les informations utiles devraient être données à la patiente quant à sa maladie et aux traitements proposés. En raison de sa grande prévalence, il existe un grand nombre de sites de qualité sur le cancer du sein qu’il est impossible de répertorier ici. Les Sites Internet de la Société Canadienne de Cancer et de Santé Canada offrent une base d’informations générales 1 2. D’autres sites canadiens, l’Association Québécoise du Lymphœdème, la Fondation du Cancer du sein du Québec, le Réseau canadien sur le cancer du sein et le groupe Virage de l’hôpital Notre Dame offrent aussi des informations utiles localement pour les patientes Québécoises 3 4 5 6 . Des sites canadiens, anglais, australiens et américains offrent de l’information de qualité 7.

    Les sites français d’oncologie Oncolor et Oncoprof ainsi que celui de la Société Canadienne du Cancer proposent aux professionnels plusieurs Hyperliens qui pourraient être utiles pour leurs patientes 8 9 10 ou pour eux-mêmes 11. Le NCI National Cancer Institute et la Société américaine d’oncologie clinique fournissent aussi des informations utiles pour les patientes 12 13. Pour celles qui désirent en connaître plus, le site américain de formation médicale continue Uptodate, offre des informations supplémentaires. Il va de soi que ces informations devront toujours être validées avec l’équipe de spécialistes responsables du patient puisque chaque cas a ses particularités 14.

    Les patientes qui ont été traitées pour un cancer du sein ont souvent de nombreuses questions sur les facteurs de risque du cancer et les facteurs de protection contre les récidives. A l'échelle d'une population on sait que le cancer du sein est plus fréquent chez les femmes sédentaires, en surpoids ou obèses, qui consomment plus d'alcool, moins d'aliments végétaux et plus de d'aliments gras. Même si nous ne disposons pas d'évidences robustes pour la survie au cancer du sein, il est recommandé d'aborder cette question des habitudes de vie avec les survivantes du cancer du sein en raison des bénéfices démontrés sur l'incidence en général des cancers et des maladies cardio-vasculaires. Une vie plus active physiquement, une réduction du poids vers des indices normaux et une alimentation riche en produits végétaux devrait faire partie des conseils à ces patientes 15 16 17.

    • 1. Société Canadienne du Cancer - Informations générales sur les cancers : www.cancer.ca
    • 2. Santé Canada : www.hc-sc.gc.ca
    • 3. Association Québécoise du Lymphœdeme : www.infolympho.ca
    • 4. Fondation du Cancer du sein du Québec : www.rubanrose.org
    • 5. Réseau Canadien sur le cancer du sein : www.cbcn.ca
    • 6. Groupe virage de l’hôpital Notre Dame, Montréal : www.viragecancer.org
    • 7. Site Canadien Fortes Ensemble : qui offre un répertoire exhaustif de liens internet vers des sites canadiens reconnus, selon la thématique Site Canadien Willow : www.willow.org (link is external) The Canadian Breast Cancer Network : www.cbcn.ca (link is external) Le site canadien Rethink Breast Cancer : www.rethinkbreastcancer.com (link is external) Breast Cancer Now What ?: www.breastcancernowwhat.ca (link is external) Site anglais CancerBack up : www.cancerbackup.org.uk (link is external) Site australien The Breast Cancer Network Australia : www.breastcancer.org (link is external) Oncolink , site américain : www.oncolink.com
    • 8. Oncolor : Site français de la région de Lorraine, présentant des référentiels médicaux d’investigation et de traitements, mis à jour, portant sur les principaux cancers : www.oncologik.fr (link is external) Page spécifiques au cancer du sein : www.oncologik.fr
    • 9. Oncoprof - Site français de cancérologie du Professeur Jean-François HERON; Faculté de médecine de CAEN; Excellents textes résumés sur l’oncologie générale. www.oncoprof.net
    • 10. Société Canadienne du Cancer - Informations spécifiques sur le cancer : http://www.cancer.ca/Quebec/About%20cancer/Types%20of%20cancer/What%20is...
    • 11. Oncolor : Site français de la région de Lorraine, présentant des référentiels médicaux d’investigation et de traitements, mis à jour, portant sur les principaux cancers : référentiel sur le cancer du sein www.oncologik.fr
    • 12. NCI : National Institute of cancer – USA. Site américain www.cancer.gov/cancertopics
    • 13. Cancer Net- Société américaine d’oncologie clinique - Informations pour les patients www.plwc.org/portal/site/PLWC
    • 14. Le site américain, en langue anglaise,Uptodate, qui garde à jour des informations basées sur les évidences scientifiques des traitements actuels. Il y un texte spécifique pour chaque cancer www.patients.uptodate.com
    • 15. Pierce JP, Stefanick ML and Flatt SW et al (2007) Greater survival after breast cancer in physically active women with high vegetable-fruit intake regardless of obesity J Clin Oncol 25 2345–2351
    • 16. SmithSL,Singh CarlsonS and DownieL(2011)Survivors of breast cancer:patient perspectives on survivorship care planning J Cancer Surviv 5 337–344
    • 17. Hewitt MG and Ganz PA (2007) Implementing Cancer Survivorship Care Planning Washington DC: The National Academies Press
  2. Les complications spécifiques aux traitements

    Elles sont celles reliées à la chimiothérapie cytotoxique et à la radiothérapie Complications de la chimiothérapie cytotoxique, Complications de la radiothérapie.

    Mais elles sont aussi celles reliées plus spécifiquement aux traitements ciblés comme l’Herceptin (trastuzumab), à la chirurgie et à l’hormonothérapie adjuvante ou palliative et les symptômes ménopausiques qui en découlent.

    L’omnipraticien aura régulièrement à recevoir les femmes souffrant de symptômes pénibles de ménopause après des traitements pour un cancer du sein. L’Association médicale du Canada a émis des recommandations à ce sujet 1. Il n’est pas recommandé d’offrir une hormonothérapie de remplacement aux femmes traitées pour un cancer du sein en raison du risque augmenté possible, encore controversé, de récidives du cancer du sein 2. Par contre, la Société canadienne des gynécologues et obstétriciens met en garde contre le refus systématique d’une hormonothérapie systémique de remplacement aux femmes qui souffrent de symptômes ménopausiques sévères : elle va jusqu’à suggérer que l’hormonothérapie de remplacement demeurerait une option pour les patientes ayant souffert de cancer du sein lorsque les risques potentiels sont expliqués et acceptés par la patiente 3.

    Ce risque jusqu'à maintenant théorique fait en sorte qu’il est recommandé de suggérer aux patientes souffrant de symptômes pénibles de ménopause d’essayer tout d’abord des thérapies alternatives aux œstrogènes systémiques. Les données actuelles (WHI Study) ne démontrent pas d'augmentation de cancer du sein chez les femmes qui ont pris un oestrogène sans progestatif: il est possible que les craintes vis à vis du cancer du sein (nouveau cancer ou récidive) soient associées plus à la prise de progestatif qu'à la prise d'oestrogènes mais les données à ce sujet sont incomplètes.

    La sécheresse vaginale symptomatique sévère, réfractaire aux traitements standards avec des lubrifiants et des hydratants vaginaux, peut répondre à de petites doses d’œstrogène local à petite dose en crème vaginale une à deux fois par semaine ou sous forme d'anneau vaginal (3 mois) à faible dose d'estradiol de type Estring.  Des données récentes semblent démontrer un niveau sérique moindre d'estradiol avec les anneaux, donc une absorption systémique probablement moindre (évidence faible) : le niveau sérique d’œstrogène (estradiol) avec le traitement vaginal è faible dose est soit indétectable, soit négligeable. Même si l'administration d'estradiol topique vaginal à petites doses est probablement sans danger pour les patientes les cliniciens demeurent prudents et ne l'autorisent que lorsque la sécheresse vaginale est sévère, qu'elle ne répond pas aux traitements topiques non hormonaux et que la réponse au traitement vaginal d'estradiol est clairement positive et mérite donc d'être poursuivie 4 5 6 7.

    Les bouffées de chaleur sont fréquentes et pénibles, surtout avec les bloqueurs hormonaux. La Valenfaxine à petites doses aurait démontré une efficacité contre les bouffées de chaleur, mais chez certaines femmes seulement 8. Ceci concerne probablement d’autres ISRS. Les produits naturels comme la vitamine E et les phytoestrogènes n’ont pas fait preuve d’efficacité hormis l’effet placebo.

    Il semble que les femmes traitées pour un cancer du sein aient un risque augmenté de fracture ostéoporotique, quels que soient les traitements reçus et les autres facteurs de risque 9. La ménopause précoce qui peut résulter du traitement du cancer du sein augmente les risques d’ostéoporose à long terme. Le tamoxifène possède une activité anti oestrogénique bénéfique au niveau du sein, mais on ignore  son activité précise au niveau de l’os. Un modulateur sélectif des récepteurs oestrogéniques, le raloxifène, possède des effets agonistes sur les os alors qu’il a des effets antagonistes sur les seins et l’utérus, effets bénéfiques pour les femmes traitées pour un cancer du sein mais il est trop tôt pour proposer cette molécule en prévention ou en traitement de l’ostéoporose chez les femmes traitées pour un cancer du sein 10. Les inhibiteurs de l’aromatase ont un potentiel ostéoporotique démontré 11. Le dépistage de l’ostéoporose est donc recommandé de routine chez les femmes qui ont été traitées pour un cancer du sein : le traitement préventif aux biphosphonates pourra être proposé à celles dont la densité osseuse est abaissée (DMO  2, 5 et moins).

    Le lymphoedème du bras après la chirurgie axillaire ou lors de l’envahissement de l’aisselle à fait l’objet jusqu’à maintenant de peu de recherches et de publications alors qu’il est encore relativement prévalent après une mastectomie et source d’inconfort souvent important. Heureusement, avec les nouvelles techniques chirurgicales moins mutilantes et l’analyse du ganglion sentinelle, le risque de lymphœdème est réduit. 15 % environ des femmes en souffriront après un curage axillaire et la radiothérapie locale par la suite, radiothérapie qui ne sera pas effectuée si l’analyse du ganglion est négative. Les diurétiques ne sont pas utiles pour soulager ces patientes. Ces compressions manuelles, pneumatiques ou sous forme de bandages compressifs peuvent aider à contenir et limiter le lymphoedème. L’association québécoise du lymphoedème offre des renseignements à ce sujet 12.

    Les traitements par le trastuzumab (Herceptin) et certaines molécules de chimiothérapies cyto toxiques peuvent amener des complications cardiaques sérieuses chez certaines patientes, une insuffisance cardiaque habituellement irréversible. Le suivi de la fonction cardiaque pendant et après le traitement au Herceptin est recommandé puisque la molécule peut persister jusqu’à 24 semaines dans la circulation après sa dernière administration. La surveillance de la fonction cardiaque pendant et après le traitement avec l’Herceptin inclut l’évaluation clinique, un électrocardiogramme et une échographie cardiaque, au début du traitement, puis 3, 6, 12, 18, 24, 36 et 60 mois après la fin du traitement 13.

    Les autres effets indésirables les plus fréquents lors du traitement avec le Herceptin, sont les frissons, la fièvre, les nausées, la raideur, les céphalées, la faiblesse, mais ils sont habituellement moins sévères que ceux retrouvés avec une chimiothérapie cytotoxique.

    La fibrose à long terme du plexus brachial (plexite brachiale) peut survenir, et ce, même des années après le traitement. La résonance magnétique est l’imagerie médicale la plus apte à différencier la fibrose versus une récidive avec envahissement du plexus brachial. Une animation du site Palli-science détaille la présentation clinique de ce syndrome très douloureux. Animation Plexus brachial

    • 1. Holmberg L, Anderson, H. HABITS (hormonal replacement therapy after breast cancer- Is it safe ?); A randomised comparison: trial stopped. Lancet 2004 feb; 7; 363 (9407) : 453-455
    • 2. SOGC - Société Canadienne des gynécologues et obstétriciens du Canada. Recours à l’hormonothérapie substitutive après un traitement contre le cancer du sein http://sogc.org
    • 3. SOGC - Société Canadienne des gynécologues et obstétriciens du Canada. The detection and management of vaginal atrophy : http://sogc.org
    • 4. SOGC - Consensus Canadien sur le traitement de la ménopause http://sogc.org
    • 5. Melisko ME, Goldman ME, Hwang J, et al. Vaginal testosterone cream vs estradiol vaginal ring for vaginal dryness or decreased libido in women receiving aromatase inhibitors for early-stage breast cancer: a randomized clinical trial. JAMA Oncol. 2016 Nov 10
    • 6. US Food and Drug Administration. FDA approves Intrarosa for postmenopausal women experiencing pain during sex. http://www.fda.gov/NewsEvents/Newsroom/PressAnnouncements/ucm529641.htm
    • 7. Barber, RJ, et al ; IMS recommandations on women’s midlife health and menopause hormone therapy ; Climacteric. 2016 Apr;19 (2):109-50.
    • 8. Loprinzi CL, Kugler JW, Sloan J, Mailliard A, LaVasseur B, Barton D, et al. Venlafaxine in management of hot flashes in survivors of breast cancer: a randomized trial. Lancet 2000;356:2059-63.
    • 9. Chen Z; Maricic M; Bassford TL; Pettinger M; Ritenbaugh C; Lopez AM; Barad DH; Gass M; Leboff MS; Fracture risk among breast cancer survivors: results from the Women's Health Initiative Observational Study. Arch Intern Med 2005 Mar 14;165 (5) : 552-8.
    • 10. SOGC; Conférence canadienne de consensus sur l’ostéoporose, mise à jour 2006. Directives cliniques de la; No 172; février 2006; www.sogc.org
    • 11. Pouillès JM, Ribot C. Cancer du sein et risque d’ostéoporose. Lettre Rhumatologique 2005; 310 : 26-32
    • 12. Association Québécoise du Lymphœdeme; www.infolympho.ca
    • 13. Piccart, MJ et al. Trastuzumab after Adjuvant Chemotherapy in HER2-Positive Breast Cancer; NEJM; 2005; 353; 1659-1672
  3. Le suivi médical pour détecter les récidives et la consultation en spécialité au besoin

    Fiche de détection d’une récidive d’un cancer du sein

    Le cancer du sein est maintenant considéré comme une maladie chronique : il peut récidiver plus de 20 ans après le traitement. La majorité des rechutes, soit 80 %, surviennent dans les cinq premières années. Les taux de survie diminuent au fil des ans, avec une survie relative de 70 % vingt ans après le diagnostic comparé à 88 %  et 82 % 5 et 10 ans après le traitement 1 2.

    La moitié des cancers du sein récidiveront dans les dix années qui suivent le traitement, le quart localement, les autres trois quarts sous forme de métastases. Le médecin de famille est bien placé pour suivre ces patientes et les référer au besoin au spécialiste puisque rares sont les récidives qui surviendront au moment des rendez-vous de suivi de routine en spécialité. En effet, environ 60% des récidives locales ou régionales (ganglions axillaires et sus-claviculaires) se présentent entre les visites prévues 3 4.

    Les soins aux femmes survivantes du cancer comportent 4 facettes : surveillance et dépistage, prise en charge des effets indésirables long terme des traitements, promotion de la santé et coordination des soins 5 6. En effet, une canadienne sur 107 a un diagnostic de cancer du sein posé dans les 10 dernières années, dont la majorité (93%) aux stades I à III: le médecin de famille est donc souvent confronté à ces patientes dans sa pratique quotidienne.

    Le Groupe anglais NICE, l’Association Américaine d’Oncologie Clinique et le Groupe d’Étude Canadienne sur les Soins de Santé Préventifs ont émis des recommandations quant au suivi recommandé après un traitement pour cancer du sein 7 8 9. Celles-ci ont été reprises dans une publication récente du Médecin de famille Canadien 10. Ils recommandent de revoir régulièrement les patientes essentiellement dans le but de détecter précocement des récidives locales au même sein et à l’autre sein ainsi qu'au adénopathies régionales (axillaires, sus-claviculaires): ce suivi clinique devrait se faire aux 3-6 mois pour 1-3 ans, aux 6-12 mois pour 2 ans puis annuellement 11. On recherche au questionnaire des symptômes thoraciques ou aux aisselles et des symptômes métastatiques possibles, au foie, aux poumons, aux os ou au cerveau, les sites les plus fréquents de métastases. L'auto-examen des seins par la patiente est recommandé à la même fréquence, qui doit être avisée de consulter sans délai en cas d'anomalies.

    Le dépistage des autres cancers doit être fait comme pour la population en général (cancer colorectal, cancer du col utérin). On encourage l'arrêt du tabac et une saine alimentation associée à une perte de poids si présence d'obésité (facteur de risque de cancer). Le dépistage de l'ostéoporose aux 2-3 ans par une densité osseuse est recommandé, surtout si la patiente est sous traitement hormonal.

    On recherche des complications des traitements, dont le lymphoedème au bras, la fatigue, l'anxiété, la dépression, l’insuffisance cardiaque et les symptômes de privation oestrogénique (chaleurs, atrophie génitale, difficultés sexuelles) 12 13.

    Des évidences (niveau III) semblent démontrer un avantage pour les patientes à se faire examiner régulièrement ainsi : l’examen physique des seins et des aires ganglionnaires axillaires et sus-claviculaires, associé à une mammographique annuelle fait donc l’objet de consensus 14. Par contre, la résonance magnétique ne doit pas être utilisée de routine mais elle peut être utile pour caractériser une image suspecte à la mammographie dans un sein irradié. Il n'est pas utile non plus de procéder à une recherche agressive (imagerie, prises de sang) de possibles métastases asymptomatiques puisque cette recherche n'améliore pas la survie des patientes. Ceci doit être expliqué aux patients inquiètes 15.

    L’examen physique inclut l’examen gynécologique habituel (aux 2 ans) mais de façon plus rapprochée si la patiente a reçu du tamoxifène: aux 3 à 6 mois pour les trois premières années, puis aux 12 mois à vie par la suite.

    Les examens mammographiques annuels sont débutés habituellement un an après la chirurgie initiale.

    La patiente devrait être au courant des signes et symptômes à surveiller pour lesquels elle devrait communiquer avec son médecin sans délai : douleur, inconfort ou nouvelle masse au sein ou à l’aisselle, nodules cutanés au thorax douleurs au dos, au thorax ou à l’abdomen, céphalées nouvelles ou persistantes, perte de poids, faiblesse, toux et dyspnée, symptômes neurologiques focaux de possibles métastases cérébrales Exemples de cancer du sein selon le stade

    De façon pratique, la patiente devrait savoir qui contacter sans délai à l’apparition de signes ou symptômes nouveaux. L’infirmière pivot en oncologie et le médecin de famille sont les deux professionnels en première ligne faciles à rejoindre. Le médecin de famille devrait vérifier si le nouveau symptôme est de nature possiblement cancéreuse ou non. Il devrait ensuite procéder rapidement à l’investigation nécessaire et contacter le spécialiste si la récidive est confirmée ou possible. Ce dernier complètera alors l'investigation et vérifiera si la patiente pourrait recevoir un traitement, même non curatif, dans l’optique de préserver le plus longtemps possible sa qualité de vie.

    Les omnipraticiens sont confrontés relativement souvent à des cas de cancers du sein métastatiques, souvent chez des femmes âgées ou frêles. Ils ne doivent pas hésiter à référer ces patientes au spécialiste. En effet, la thérapie hormonale peut être une option efficace pour celles dont les récepteurs oestrogéniques ou progestatifs sont positifs, et ce, même si la possibilité d’une rémission pathologique complète est inférieure à celle qui aurait été procurée par la chimiothérapie 16. La réponse à ces agents devrait être évaluée après 3 mois : si la tumeur est stable ou même plus petite, on les poursuit pour au moins 6 mois. Si la tumeur progresse, les patientes sous tamoxifène peuvent passer aux inhibiteurs de l’aromatase ou vice-versa. Tableau XII

    Les patientes non ménopausées traitées pour un cancer du sein qui désirent une méthode contraceptive réversible devraient se voir proposer en premier lieu le stérilet cuivré ou des méthodes barrières comme le condom ou le diaphragme. Il n’y a pas de données disponibles pour garantir la sécurité des femmes qui utiliseraient une méthode contraceptive progestative après un traitement pour un cancer du sein, même pour les stérilets hormonaux. La Société des Gynécologues et Obstétriciens Canadiens a donc émis la recommandation de ne proposer ces méthodes qu’en dernier recours, lorsque les bénéfices l’emportent sur les risques théoriques, en informant bien les patientes de ceci 17.

     

    Tableau XII -

    Recommandations simplifiées de traitements pour le cancer du sein métastatique HER 2 négatif.

    Femmes post ménopausées avec récepteurs œstrogéniques/progestatifs positifs

    • Inhibiteurs de l’aromatase d’emblée si non essayés encore ou cessés depuis plus de 12 mois, ou Tamoxifène d’emblée
    • Si progression sous inhibiteurs de l’aromatase : tamoxifène
    • Si progression sous inhibiteur de l’aromatase et tamoxifène, des molécules de troisième ligne peuvent être tentées
    • Si progression rapide et selon la localisation des métastases, chimiothérapie cytotoxique d’emblée

    Femmes pré ménopausées avec récepteurs oestrogéniques/progestatifs positifs

    • Agoniste de la LHRH et tamoxifène ensemble ou séquentiels
    • Échec après tamoxifène : suppression ovarienne (ovariectomie bilatérale ou agonistes de la LHRH) sinon inhibiteur de l’aromatase ?
    • Échec après suppression ovarienne et tamoxifène : inhibiteur de l’aromatase

    Femmes dont les récepteurs hormonaux sont négatifs

    • Chimiothérapie systémique si possible.
    • Biphosphonates pour toute femme avec métastases osseuses lytiques, surtout si symptomatiques

     

    Le trastuzumab (Herceptin) a permis de faire un grand pas dans le traitement du cancer du sein métastatique. Malheureusement, cette molécule est totalement inefficace et donc non indiquée chez environ 75 % des  patientes atteintes d’un cancer du sein métastatique, celles dont la tumeur ne démontre pas une surexpression de l’oncogène HER 2. Environ la moitié des patientes qui reçoivent le trastuzumab vont répondre au traitement : les réponses cliniques se feront alors sur plusieurs mois à plusieurs années.

    Le traitement du cancer du sein localement avancé et du cancer inflammatoire représente un défi : ces deux cancers sont pour la plupart considérés comme inopérables, avec un risque de métastases et de récidives locales très élevé. Grâce à la chimiothérapie néo adjuvante, il est maintenant possible de réduire le volume de certains cancers volumineux du sein pour procéder ensuite à la chirurgie.

    La combinaison de la radiothérapie et de la chirurgie améliore le contrôle local dans certains cas, mais améliore relativement peu la survie à 5 ans.

    On procède maintenant, lorsque c’est possible, à une chimiothérapie d’induction suivie, lorsque possible, d’un traitement locorégional (radiothérapie et/ou chirurgie) et d’une thérapie hormonale lorsque les récepteurs sont positifs.

    On réserve le traitement hormonal néo adjuvant seul aux femmes plus âgées frêles ou celles qui refusent les traitements plus agressifs 18. Pour les femmes avec des récepteurs HER-2 positifs, il est recommandé de leur proposer le trastuzumab.

    • 1. Sisler, J et al ; Suivi après le traitement du cancer du sein Guide pratique des soins aux survivantes à l’intention des médecins de famille ; Le Médecin de famille canadien | VOL 62: OCTOBER OCTOBRE 2016
    • 2. Comité consultatif des Statistiques canadiennes sur le cancer de la Société canadienne du cancer.Canadian cancer statistics, 2015. Special topic: predictions of the future burden of cancer in Canada. Toronto, ON : Société canadienne du cancer; 2015.
    • 3. Worster, A, Wood, M L, McWhinney, I, Bass, M, J. Who provides follow-up care for patients with early breast cancer ? Canadian Family Physician; 1995; 41 : 1314-1320
    • 4. De Bock GH, Bonnema J, van Der Hage J, Kievit J, van de Velde CJH. Effectiveness of routine visits and routine tests in detecting isolated locoregional recurrences after treatment for early-stage invasive breast cancer: a meta- analysis and systematic review. J Clin Oncol 2004;22(19):4010-8.
    • 5. Luctkar-Flude M, Aiken A, McColl MA, Tranmer J. A comprehensive frame- work and key guideline recommendations for the provision of evidence-based breast cancer survivorship care within the primary care setting. Fam Pract 2014;32(2):129-40.
    • 6. Willis A, Hoffler E, Villalobos A, Pratt-Chapman M. National Cancer Survivorship Resource Center toolkit. Provider tools. Implementing clinical practice guide-lines for cancer survivorship care. Washington, DC: George Washington Cancer Institute, American Cancer Society; 2016.
    • 7. Groupe d’étude canadien sur les soins de santé préventifs www.phac-aspc.gc.ca
    • 8. Khatcheressian, JL, Wolff, AC, Smith, TJ et al. American Society of Clinical Oncology 2006 Update of the Breast Cancer Follow-up and Management Guidelines in the Adjuvant Setting. J Clin Oncol 2006; 24 : 5091-5097
    • 9. Site anglais NICE : National Institute for Health and Clinical Excellence -page spécifique au cancer du sein : www.nice.org.uk
    • 10. Siller, J, Chaput, G, Sussman, J, Ozokwelu, E. Suivi après le traitement du cancer du sein ; Guide pratique des soins aux survivantes à l’intention des médecins de famille. Médecine de famille Canadien oct 2016, vol 62
    • 11. Khatcheressian JL, Hurley P, Bantug E, Esserman LJ, Grunfeld E, Halberg F et coll. Breast cancer follow-up and management after primary treatment: American Society of Clinical Oncology clinical practice guideline update. J Clin Oncol 2013;31(7):961-5. Publ. en ligne du 5 nov. 2012
    • 12. Shockney LD. Management of long-term side effects. Dans: Shockney LD, rédacteur. Breast cancer survivorship care: a resource for nurses. Sudbury, MA: Jones and Bartlett Publishers; 2011. p. 36-58
    • 13. Frost MH, Suman VJ, Rummans TA, Dose AM, Taylor M, Novotny P et coll. Physical, psychological and social well-being of women with breast cancer: the influence of disease phase. Psychooncology 2000;9(3):221-31
    • 14. Groupe d’étude canadien sur les soins de santé préventifs www.phac-aspc.gc.ca
    • 15. Rojas MP, Telaro E, Russo A, Moschetti I, Coe L, Fossati R et coll. Follow-up strategies for women treated for early breast cancer. Cochrane Database Syst Rev 2005;(1):CD001768
    • 16. Hoff, PM, Valero, V, Buzdar, AU, et al. Combined modality treatment of locally advanced breast carcinoma in elderly patients or patients with severe comorbid conditions using tamoxifen as the primary therapy. Cancer 2000; 88 : 2054
    • 17. SOGC /GOC Joint Clinical Practice Guidelines. Progesterone-Only and Non-Hormonal Contraception in the Breast Cancer Survivor : Joint Review and Committee Opinion of the Society of Obstetricians and Gynaecologists of Canada and the Society of Gynecology Oncologists of Canada. Juillet 2006, No.179.
    • 18. Kaufmann, M, Hortobagyi, GN, Goldhirsch, A et al. Recommandations from an international expert panel on the use of neoadjuvant ( primary) systemic treatment for operable breast cancer : an update. J Clin Oncol 2006; 24 : 1940
  4. Le rôle du médecin de famille lors de l’évolution palliative

    Toute patiente avec un cancer du sein nouvellement diagnostiqué devrait avoir un suivi conjoint par un médecin de famille, étant donné l’espérance de vie de ces femmes qui survivront en majorité à ce cancer ou, pour celles avec un cancer avancé ou métastatique, qui y survivront peut être quelques années. Le rôle du médecin de famille lors de l’évolution palliative du cancer du sein est important : il doit savoir contrôler la douleur chez ces patientes ainsi que les autres symptômes. Il doit pouvoir visiter sa patiente à domicile lorsque les déplacements deviennent difficiles ou référer sinon sa patiente à un médecin qui pourra le faire. Les analgésiques opiacés et non opiacés demeurent la pierre angulaire du traitement palliatif chez les patientes souffrantes, à l’exception des métastases osseuses uniques qui peuvent très bien répondre à une radiothérapie antalgique 1 Mini-guide «Palli-Science».

    La patiente en relativement bonne condition générale Annexe 9 - Statut de performance avec une récidive loco régionale ou des métastases pourrait être référée en spécialité pour un possible traitement, car nombreuses sont les patientes chez qui un traitement permettra une prolongation de leur vie avec qualité. Par contre, les patientes en fin de vie et celles avec une très courte espérance de vie devront recevoir d'emblée un traitement orienté vers les soins de confort. Pour les cas intermédiaires, il est impossible actuellement de formuler des recommandations uniformes; on doit procéder cas par cas, avec l’aide du spécialiste.

    La chimiothérapie palliative et l’hormonothérapie palliative semblent apporter un bénéfice net de survie qui doit être discuté avec la patiente et son oncologue.

    La radiothérapie peut être offerte en palliatif pour le soulagement des symptômes locaux ou à distance comme une métastase cérébrale, le syndrome de la veine cave supérieure, la compression médullaire ou une douleur osseuse.

    Les biphosphonates intra veineux ou oraux sont utiles pour traiter les métastases osseuses du cancer du sein : ils peuvent améliorer de façon significative la qualité de vie de ces patientes 2. Les biphosphonates devraient être envisagés pour tout cas de cancer du sein métastatique aux os symptomatiques avec une espérance de vie de quelques mois ou plus en raison de leur efficacité et de la réduction des hospitalisations pour fractures pathologiques : des critères de sélection précis existent à ce sujet. On priorise les patientes dont les douleurs osseuses n’ont pas répondu à l’hormonothérapie et qui n’ont pas de métastases ailleurs et pour les patientes avec une atteinte osseuse multifocale, les lésions uniques pouvant être traitées par radiothérapie.

    Certains problèmes du stade des soins palliatifs sont plus spécifiques au cancer du sein et font appel à l’expertise d’une équipe multidisciplinaire dont les infirmières à domicile et les radio oncologues : les plaies thoraciques néoplasiques massives ou d’aspect fongoïde (le cancer du sein se comporte alors comme un cancer cutané agressif), les récidives locales sur la plaie, les tumeurs axillaires douloureuses et les nodules thoraciques métastatiques qui peuvent devenir une source de graves déformations esthétiques et de grandes souffrances physiques. La radiothérapie locale peut aider certains cas. Selon la dose reçue (il y a un maximum qui peut être donné), le site impliqué et le délai de traitement,  la radiothérapie pourra ou non être répétée au même site. On ne peut pas dépasser la dose maximale par site traité par radiothérapie, car le traitement ne sera alors pas efficace et il y aura un risque élevé de toxicité sur les tissus locaux. La radiothérapie n'est pas utile habituellement pour les métastases au foie, aux poumons ou les cas d’infiltration de la moelle osseuse à partir d’un cancer du sein 3.

    • 1. Miniguide de Palli-Science ; www.maisonvictor-gadbois.com (link is external). Produit par la maison Victor Gadbois; Saint Mathieu de Beloeil; ce guide de thérapeutique en soins palliatifs est mis à jour annuellement
    • 2. Hoskin Peter, Makin Wendy. Oncology for Palliative Medicine; Oxford Press 2003; Chapitre 9 : Breast Cancer; pp 109
    • 3. Hoskin Peter, Makin Wendy. Oncology for Palliative Medicine; Oxford Press 2003; Chapitre 9 : Breast Cancer; pp 111