Les complications spécifiques aux traitements

Elles sont celles reliées à la chimiothérapie cytotoxique et à la radiothérapie Complications de la chimiothérapie cytotoxique, Complications de la radiothérapie.

Mais elles sont aussi celles reliées plus spécifiquement aux traitements ciblés comme l’Herceptin (trastuzumab), à la chirurgie et à l’hormonothérapie adjuvante ou palliative et les symptômes ménopausiques qui en découlent.

L’omnipraticien aura régulièrement à recevoir les femmes souffrant de symptômes pénibles de ménopause après des traitements pour un cancer du sein. L’Association médicale du Canada a émis des recommandations à ce sujet 1. Il n’est pas recommandé d’offrir une hormonothérapie de remplacement aux femmes traitées pour un cancer du sein en raison du risque augmenté possible, encore controversé, de récidives du cancer du sein 2. Par contre, la Société canadienne des gynécologues et obstétriciens met en garde contre le refus systématique d’une hormonothérapie systémique de remplacement aux femmes qui souffrent de symptômes ménopausiques sévères : elle va jusqu’à suggérer que l’hormonothérapie de remplacement demeurerait une option pour les patientes ayant souffert de cancer du sein lorsque les risques potentiels sont expliqués et acceptés par la patiente 3.

Ce risque jusqu'à maintenant théorique fait en sorte qu’il est recommandé de suggérer aux patientes souffrant de symptômes pénibles de ménopause d’essayer tout d’abord des thérapies alternatives aux œstrogènes systémiques. Les données actuelles (WHI Study) ne démontrent pas d'augmentation de cancer du sein chez les femmes qui ont pris un oestrogène sans progestatif: il est possible que les craintes vis à vis du cancer du sein (nouveau cancer ou récidive) soient associées plus à la prise de progestatif qu'à la prise d'oestrogènes mais les données à ce sujet sont incomplètes.

La sécheresse vaginale symptomatique sévère, réfractaire aux traitements standards avec des lubrifiants et des hydratants vaginaux, peut répondre à de petites doses d’œstrogène local à petite dose en crème vaginale une à deux fois par semaine ou sous forme d'anneau vaginal (3 mois) à faible dose d'estradiol de type Estring.  Des données récentes semblent démontrer un niveau sérique moindre d'estradiol avec les anneaux, donc une absorption systémique probablement moindre (évidence faible) : le niveau sérique d’œstrogène (estradiol) avec le traitement vaginal è faible dose est soit indétectable, soit négligeable. Même si l'administration d'estradiol topique vaginal à petites doses est probablement sans danger pour les patientes les cliniciens demeurent prudents et ne l'autorisent que lorsque la sécheresse vaginale est sévère, qu'elle ne répond pas aux traitements topiques non hormonaux et que la réponse au traitement vaginal d'estradiol est clairement positive et mérite donc d'être poursuivie 4 5 6 7.

Les bouffées de chaleur sont fréquentes et pénibles, surtout avec les bloqueurs hormonaux. La Valenfaxine à petites doses aurait démontré une efficacité contre les bouffées de chaleur, mais chez certaines femmes seulement 8. Ceci concerne probablement d’autres ISRS. Les produits naturels comme la vitamine E et les phytoestrogènes n’ont pas fait preuve d’efficacité hormis l’effet placebo.

Il semble que les femmes traitées pour un cancer du sein aient un risque augmenté de fracture ostéoporotique, quels que soient les traitements reçus et les autres facteurs de risque 9. La ménopause précoce qui peut résulter du traitement du cancer du sein augmente les risques d’ostéoporose à long terme. Le tamoxifène possède une activité anti oestrogénique bénéfique au niveau du sein, mais on ignore  son activité précise au niveau de l’os. Un modulateur sélectif des récepteurs oestrogéniques, le raloxifène, possède des effets agonistes sur les os alors qu’il a des effets antagonistes sur les seins et l’utérus, effets bénéfiques pour les femmes traitées pour un cancer du sein mais il est trop tôt pour proposer cette molécule en prévention ou en traitement de l’ostéoporose chez les femmes traitées pour un cancer du sein 10. Les inhibiteurs de l’aromatase ont un potentiel ostéoporotique démontré 11. Le dépistage de l’ostéoporose est donc recommandé de routine chez les femmes qui ont été traitées pour un cancer du sein : le traitement préventif aux biphosphonates pourra être proposé à celles dont la densité osseuse est abaissée (DMO  2, 5 et moins).

Le lymphoedème du bras après la chirurgie axillaire ou lors de l’envahissement de l’aisselle à fait l’objet jusqu’à maintenant de peu de recherches et de publications alors qu’il est encore relativement prévalent après une mastectomie et source d’inconfort souvent important. Heureusement, avec les nouvelles techniques chirurgicales moins mutilantes et l’analyse du ganglion sentinelle, le risque de lymphœdème est réduit. 15 % environ des femmes en souffriront après un curage axillaire et la radiothérapie locale par la suite, radiothérapie qui ne sera pas effectuée si l’analyse du ganglion est négative. Les diurétiques ne sont pas utiles pour soulager ces patientes. Ces compressions manuelles, pneumatiques ou sous forme de bandages compressifs peuvent aider à contenir et limiter le lymphoedème. L’association québécoise du lymphoedème offre des renseignements à ce sujet 12.

Les traitements par le trastuzumab (Herceptin) et certaines molécules de chimiothérapies cyto toxiques peuvent amener des complications cardiaques sérieuses chez certaines patientes, une insuffisance cardiaque habituellement irréversible. Le suivi de la fonction cardiaque pendant et après le traitement au Herceptin est recommandé puisque la molécule peut persister jusqu’à 24 semaines dans la circulation après sa dernière administration. La surveillance de la fonction cardiaque pendant et après le traitement avec l’Herceptin inclut l’évaluation clinique, un électrocardiogramme et une échographie cardiaque, au début du traitement, puis 3, 6, 12, 18, 24, 36 et 60 mois après la fin du traitement 13.

Les autres effets indésirables les plus fréquents lors du traitement avec le Herceptin, sont les frissons, la fièvre, les nausées, la raideur, les céphalées, la faiblesse, mais ils sont habituellement moins sévères que ceux retrouvés avec une chimiothérapie cytotoxique.

La fibrose à long terme du plexus brachial (plexite brachiale) peut survenir, et ce, même des années après le traitement. La résonance magnétique est l’imagerie médicale la plus apte à différencier la fibrose versus une récidive avec envahissement du plexus brachial. Une animation du site Palli-science détaille la présentation clinique de ce syndrome très douloureux. Animation Plexus brachial

  • 1. Holmberg L, Anderson, H. HABITS (hormonal replacement therapy after breast cancer- Is it safe ?); A randomised comparison: trial stopped. Lancet 2004 feb; 7; 363 (9407) : 453-455
  • 2. SOGC - Société Canadienne des gynécologues et obstétriciens du Canada. Recours à l’hormonothérapie substitutive après un traitement contre le cancer du sein http://sogc.org
  • 3. SOGC - Société Canadienne des gynécologues et obstétriciens du Canada. The detection and management of vaginal atrophy : http://sogc.org
  • 4. SOGC - Consensus Canadien sur le traitement de la ménopause http://sogc.org
  • 5. Melisko ME, Goldman ME, Hwang J, et al. Vaginal testosterone cream vs estradiol vaginal ring for vaginal dryness or decreased libido in women receiving aromatase inhibitors for early-stage breast cancer: a randomized clinical trial. JAMA Oncol. 2016 Nov 10
  • 6. US Food and Drug Administration. FDA approves Intrarosa for postmenopausal women experiencing pain during sex. http://www.fda.gov/NewsEvents/Newsroom/PressAnnouncements/ucm529641.htm
  • 7. Barber, RJ, et al ; IMS recommandations on women’s midlife health and menopause hormone therapy ; Climacteric. 2016 Apr;19 (2):109-50.
  • 8. Loprinzi CL, Kugler JW, Sloan J, Mailliard A, LaVasseur B, Barton D, et al. Venlafaxine in management of hot flashes in survivors of breast cancer: a randomized trial. Lancet 2000;356:2059-63.
  • 9. Chen Z; Maricic M; Bassford TL; Pettinger M; Ritenbaugh C; Lopez AM; Barad DH; Gass M; Leboff MS; Fracture risk among breast cancer survivors: results from the Women's Health Initiative Observational Study. Arch Intern Med 2005 Mar 14;165 (5) : 552-8.
  • 10. SOGC; Conférence canadienne de consensus sur l’ostéoporose, mise à jour 2006. Directives cliniques de la; No 172; février 2006; www.sogc.org
  • 11. Pouillès JM, Ribot C. Cancer du sein et risque d’ostéoporose. Lettre Rhumatologique 2005; 310 : 26-32
  • 12. Association Québécoise du Lymphœdeme; www.infolympho.ca
  • 13. Piccart, MJ et al. Trastuzumab after Adjuvant Chemotherapy in HER2-Positive Breast Cancer; NEJM; 2005; 353; 1659-1672
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